Décryptage de l’annonce, par la première ministre, d’une modification de la fiscalité des produits du tabac qui entraine une modification des prix dès le mois prochain.
Pour l’avenir de la lutte contre le tabac, le PROJET DE LOI de financement de la sécurité sociale pour 20231 déposé par le gouvernement sous le n° 274 se traduira, dans les faits, par des avancées majeures, comme par des renoncements coupables qui ne permettront pas d’atteindre l’objectif d’une génération sans tabac pour 2030 fixé par le président de la République
Les montants sont exprimés pour 20 gr ou 20 unités
Produits | Augmentation moyenne au 1er mars 2023 | Augmentation en % | Marge du fabricant par unité ou par gramme |
Cigarette | 0,70 € | 7% | De 0,49 à 0,83 € |
Cigare cigarillo | 0,20 € | < 3% | De 0,13 à 8,01 € |
Tabac à rouler | 1,25 € | 12% | De 0,71 à 1,07 € |
Tabac chauffé | 4,00 € | De 42 à 140% | De 0,70 à 1,48 € |
Autres tabacs (chicha..) | 0,20 € | 1% | De 2,50 à 5,45 € |
Des augmentations de prix différentes
Tabac à chauffer et tabac à rouler sont enfin considérés comme des produits de repli qui permettent de demeurer dans l’addiction au tabac lorsque le prix de la cigarette augmente. La fiscalité qui leur est appliquée dans ce projet de loi est une avancée majeure.
La fiscalité du tabac à chicha ne tient pas compte de l’expansion importante de ce produit, mais il est vrai que la priorité pour ce produit est de lutter contre les achats illégaux. Il serait temps également que les agents de contrôle (police et gendarmerie) soient missionnés dans le cadre des lieux de consommation de la chicha qui sont majoritairement en infraction.
La réintégration des cigarillos de moins de 2,3 grammes dans la catégorie fiscale des cigarettes met fin à la supercherie des cigarettes déguisées en cigarillos à moindre prix.
La revalorisation très faible de la fiscalité des cigares est cependant un « bon geste » socialement contestable pour une catégorie de produits privilégiée par les CSP+
Tabac à priser et tabac à macher sont totalement oubliés alors que la consommation des tabacs à macher est en perpétuelle augmentation et que de nouveaux produits apparaissent régulièrement
Le danger extrême d’une indexation de la fiscalité sur l’inflation
L’augmentation prévue de 70 centimes des cigarettes n’est une bonne nouvelle qu’en apparence. Elle cache le renoncement à la seule politique efficace de fiscalité. En effet, les deux seules régressions importantes de consommation en France ont été obtenues, en 2003 comme en 2017, par des campagnes de fiscalité agressives.
Pour déclencher le réflexe d’arrêt chez le fumeur, il faut à la fois qu’on lui annonce à l’avance l’objectif à long terme (paquet à 10€ ou à 15€) et que cet objectif lui soit rappelé régulièrement par des augmentations fortes ou rapprochées. Or l’annonce d’une indexation du prix du tabac sur l’inflation ne permet plus d’adopter cette politique. Elle rend normales et acceptables les augmentations annuelles comme celles de la baguette ou du litre de lait.
L’indexation des prix du tabac sur l’inflation signe la défaite anticipée de votre vœu, monsieur le président, de voir une génération sans tabac : supprimez cette récente décision qui prive vos services les plus sérieux de leur outil le plus précieux.